ATAVISME

"Atavisme" est une utopie en marche. Il ne sera pas ici question du texte de la pièce, puisqu'il n'est pas écrit à l'heure où ces lignes sont imprimées ; et sans doute ne sera-t-il pas totalement achevé avant l'arrivée de la troupe à Vladivostok... Un journaliste tente de reconstituer les dernières années de la vie d'un chanteur de music-hall démodé et malade. Ce faisant, il nous entraîne dans le voyage mental de ce héros fatigué : une course vers l'orient sur les traces d'une acrobate rêvée. La caravane du Collectif Zou, embarquant artistes de cirque et de théâtre, empruntant au passage les langues des pays traversés, va mettre en œuvre en grandeur nature ce rêve fou. Dans le sillage des poètes et des grands voyageurs, une nouvelle prose du transsibérien s'écrit sous nos yeux, au gré des rencontres qui émailleront le parcours. Si tous les spectateurs de Brest à Vladivostok pouvaient se donner la main, ils pourraient à eux tous dresser le portrait de ce spectacle-mosaïque. Ici la réalité du voyage donne corps et sens au projet théâtral ; elle ancre la magie dans le concret. Après la marche, que Philippe Fenwick a racontée dans Un théâtre qui marche, 7000 kilomètres à pied à la suite d'un théâtre, cet artiste de l'itinérance choisit aujourd'hui le train. Et on se prend à imaginer les adieux sur les quais de gare, à déchiffrer les indicateurs de chemins de fer, à se laisser bercer par les paysages et les noms des stations. "Atavisme" est aussi une fabrique à rencontres, où l'éphémère du passage est de la même essence que celui du spectacle, une porte ouverte, une provocation à l'impossible.